Mai 68 : l’occupation de la Faculté des Lettres de Besançon, vue des Chaprais
Nous avons peu évoqué mai 68 à Besançon. Le chapraisien Alain Prêtre, a bien évoqué, dans un article paru sur ce blog le 19 mai 2018 « son mai 68 » alors qu’il était au service militaire au 19° régiment de Génie à Besançon. Mais c’est tout…
Et pour cause : l’essentiel se déroulait en dehors de notre quartier, dans la Boucle. Certes quelques usines des Chaprais avaient suivi le mouvement et étaient en grève. Mais lorsqu’il s’agissait de manifester, tout le monde se retrouvait au centre ville.
Une anecdote a cependant retenu notre attention : nous l’avons relevée dans un mémoire de maîtrise soutenu lors de l’année universitaire 1995-1996 par Nadège FAIVRE, sous le titre « Mai 1968 à la Faculté de Lettres de Besançon ».
Une image de mai 68 à Besançon (devant église Saint-Pierre) devenue une véritable icône…
Novembre 2017 : la rentrée solennelle universitaire avait était mouvementée devant la Fac de Lettres. Réunis au théâtre, ministres et autorités doivent traverser la rue pour entrer à la Fac. Quelques dizaines de militants de l’UNEF les attendent. Ils se feront matraquer…Cette épisode est resté célèbre, grâce au Canard enchaîné qui évoqua, non point de rentrée universitaire, mais de la raclée universitaire.
Après avoir rappelé que l’occupation de la Faculté des Lettres par les étudiants dont certains y passaient la nuit, était fantasmée par une partie de la population bisontine qui assimilait cet endroit à un lieu où les étudiants faisaient surtout leur révolution sexuelle, bref une sorte de lieu de perversion, Nadège Faivre rapporte ce témoignage de Maurice Thiriet, alors étudiant en Histoire et militant de la cause…
« …J’étais allé avec Rémy Gandillier et Jean-Luc Rénahy (parce qu’on était encore calotin) à la messe aux Chaprais. C’était un dimanche après-midi à 5h. A la fin du sermon, le curé assimile la faculté des lettres à la commune de 1870 et dit en résumé qu’il faudrait demander à Dieu de pardonner les péchés de la fac de lettres, comme il a pardonné les péchés de la Commune. Alors, à ce moment là, on s’est retenu pour ne pas partir parce que c’était la fin du sermon. Après on a pris la parole et on a été pris à partie par une série de gros bras de l’église qui nous ont accompagnés jusqu’à la rue Baille et presque jusqu’à la rue de Belfort. Ils voulaient nous casser la figure en nous disant : »Allez faire vos couchailleries à la Fac! ». Je me souviens encore de cette anecdote : les gens étaient stupéfaits qu’on puisse faire des choses de bon sens à la Fac. Il se trouve qu’on était trois historiens qui savaient très bien ce qu’était le Sacré Cœur et l’ordre moral en France. » ( rappelons que le Sacré Cœur à Paris a été construit afin « d’expier » les « crimes » de la Commune!).
« Un copain me racontait que lorsqu’il allait chez lui, le dimanche, vers Clerval, il y avait des gens qui lui disaient : est-ce que c’est vrai qu’à la Fac, ils sont tous couchés ensemble les hommes et les femmes?
Une sorte de vision de Sodome et Gomorrhe…..
La revendication d’une majorité à 18 ans
La foule lors des meetings
Nous aurons peut-être l’occasion de publier quelques unes des fiches, le plus souvent élaborées par Rémy Gandillier, concernant quelques usines des Chaprais.
A l’occasion du cinquantenaire des événements de 1968, beaucoup ont souligné combien le mouvement était resté dans les mains quasi exclusives des hommes, même si l’engagement des femmes était très important. Et en ce sens, ce mouvement devait en déclencher d’autres comme les luttes des femmes pour leur émancipation et la libéralisation des mœurs. A suivre donc.
Sources : mémoire de maîtrise de Nadège Faivre; photos Bernard Faille; CPA bibliothèque de la ville; « raclée universitaire » collection privée DR.