L’histoire de Souleymane : un film de Boris Lojkine à voir
Une fiction rattrapée par la réalité
Il pédale à travers Paris pour livrer des repas. Sur son vélo il répète son histoire car dans deux jours il doit passer son entretien de demande d’asile. Il court toujours un œil sur son smartphone où il guette la destination de sa prochaine commande. Et l’autre sur la ville qu’il traverse à toute blinde ; Il doit se dépêcher car il verse une part de ses maigres bénéfices à celui qui lui loue son compte et lui prête son nom. Quand la dernière commande est livrée, il faut qu’il fonce pour attraper le bus qui l’emmène au foyer dans lequel il dort. Et pendant qu’il pédale, il répète son histoire, celle qu’il doit raconter aux fonctionnaires de l’OFPRA (Office Français de protection des réfugiés et apatrides), celle qu’on lui a vendu car tout se paye chez les humains dans cette forme d’esclavage moderne qu’on appelle l’uberisation. Seulement voilà quand on achète une histoire à quelqu’un d’autre, il faut pouvoir fournir tous les éléments sans faire d’erreur. Ce qui se joue dans ce film de fiction, c’est comment la fiction s’apparente à un documentaire ; elle s’inspire de la réalité comme cela a rarement été tenté ; les acteurs sont des non professionnels et à l’heure qu’il est le Souleymane du film (Abou Sangare) acteur incroyable est toujours en quête de régularisation après avoir été débouté plusieurs fois.
Et ils continuent de foncer avec leur sac jaune et bleu dans un Paris anonyme qui pourrait être toutes les villes. Ville étrange et étrangère pour ces travailleurs esclaves d’une société où la livraison des plats des traiteurs se font la nuit, sous la pluie pour un salaire de misère. Espérons que ce film trépidant, rythmé comme un thriller secouera nos vies par sa force et son cri.
A voir absolument